Musique
592 pages
140 x 210 mm
28,00 
978-2-494062-28-3
En librairie le 6 octobre 2023

LE MONDE DE BACH

Comprendre Bach, c’est entrer dans son monde : une époque, des lieux, des genres, des événements, et avant tout des personnes. Humbles travailleurs et décideurs, protecteurs dévoués et fonctionnaires mesquins, aristocrates fous de musique, compositeurs et instrumentistes, facteurs d’instruments…

Le Monde de Bach raconte tout cela. Il présente une période et un milieu d’une intense production de musique, hélas en grande partie perdue. Il fait revivre cette société avec ses héritages, ses usages, sa culture.

Fruit du travail de recherche de toute une vie, cette somme constitue pour les amateurs de Bach à la fois un livre de référence et une merveilleuse promenade dans l’univers du Cantor de Leipzig.

 

Cet ouvrage a bénéficié du soutien du CNL.

L'Auteur

 Musicologue et conférencier, Gilles Cantagrel a été directeur de France Musique et a enseigné à la Sorbonne. Spécialiste notamment de Bach et de son époque, il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages. Il est correspondant de l’Académie des Beaux-Arts et membre d’honneur de la Société Bach internationale de Leipzig.

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Extrait

Diapason

Pour pouvoir jouer ou chanter ensemble de façon correcte et harmonieuse, il est indispensable que tous les participants, qu’ils soient vocalistes ou instrumentistes, se soient au préalable accordés selon une règle commune, une hauteur de référence. Cette hauteur est depuis longtemps le la3 de la gamme, le la du milieu de la portée en clé de sol. Mais avant que des instruments de physique existent pour mesurer et régler cette hauteur, et même depuis, cette hauteur a beaucoup évolué, en fonction des goûts, de la température, des traditions, des matériaux, de la latitude, des instruments, des pays, des villes, etc. Le diapason à lame que nous connaissons, instrument en tant que tel, n’a été inventé qu’en 1711 par l’Anglais John Shore, le trompettiste de Haendel. Et il faut attendre le XIXe siècle pour que l’usage s’en généralise. Quant à la normalisation d’une hauteur de référence, en l’occurrence le la3, on l’a dit, elle n’apparaît qu’au milieu du même siècle, et elle est mesurée en Hertz (ou abrégé en Hz), ce que l’on nommait autrefois des périodes ou des cycles par seconde. Les études réalisées depuis sur des instruments anciens en leur état d’origine ont révélé une très grande disparité des fréquences de référence, de 370 à 563 Hz, écart considérable, supérieur à deux tons entiers. Il a fallu plusieurs conférences internationales pour trouver un accord sur une hauteur du diapason commune. Ce fut d’abord 435 Hz, à partir de 1859, puis 440 Hz en 1955. Cette valeur de 435 ou 440 Hz vaut évidemment pour la musique écrite depuis, mais pas avant. Il y a tant de valeurs du diapason jusqu’au XVIIIe siècle qu’il était impossible de fixer une valeur admise par tous. Un consensus récent s’est établi à 415 Hz, qui n’a jamais été un « diapason baroque », comme on le dit, mais une valeur moyenne, un à-peu-près qui facilite considérablement les exécutions et la facture instrumentale. Il n’empêche que des instruments anciens ayant conservé leur accord d’origine se trouvent en dehors de cette pseudo-norme, en dessous et parfois très au-dessus. C’est le plus souvent le cas des orgues d’Allemagne du Nord et du Centre, dont les jeux à tuyaux de bois ont conservé leur accord d’origine : l’orgue de tribune de l’église Saint-Jacques de Hambourg est accordé à 489 Hz, il est même aujourd’hui un peu plus élevé, à 495 Hz. À Lübeck, l’orgue de l’église Saint-Jacques est accordé à 474 Hz. À la cathédrale de Freiberg, le diapason est de 473 Hz, tandis que celui du chœur était de 465 Hz, avant restauration. Et il était courant, pour rester dans le cadre de l’Allemagne luthérienne du XVIIe et de la première moitié du XVIIIe siècles, que dans la même ville, et la même église, on utilisât deux, voire trois diapasons différents, selon la facture des instruments utilisés. On parlait de « tons », le plus élevé étant le ton du chœur (Chorton), un ton en-dessous le ton de la chambre (Kammerton) et encore un demi-ton en dessous le ton bas de la chambre (Tiefkammerton). Il y eut même un ton élevé du chœur, un demi-ton plus haut encore que le Chorton. Et eussent-ils été doués d’une oreille « absolue », les musiciens étaient accoutumés au jeu des transpositions mentales et physiques qu’impliquaient ces différentes références. Si Bach avait « l’oreille absolue », ce que l’on ignorera toujours, sans doute était-il bien capable d’opérer ces transpositions mentales auxquelles il devait être fort habitué. Ces différences d’accord entre l’orgue, les autres instruments et les voix, notamment pour ce qui est de Bach, entre Weimar et Leipzig, ont obligé le compositeur à noter les parties d’orgue de certaines œuvres dans un autre ton pour pouvoir sonner à l’unisson avec les voix. De même, quand il a réutilisé à Leipzig des œuvres écrites initialement pour Weimar où les diapasons étaient différents de ceux de Leipzig.

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GILLES CANTAGREL

Musicologue et conférencier, Gilles Cantagrel a été directeur de France Musique et a enseigné à la Sorbonne. Spécialiste notamment de Bach et de son époque, il est l’auteur d’une trentaine d’ouvrages. Il est correspondant de l’Académie des Beaux-Arts et membre d’honneur de la Société Bach internationale de Leipzig.

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